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21 mars 2010 7 21 /03 /mars /2010 17:13

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Les Frères Karamazov

      Dostoevskij 1863

 

• Témoignage de Christian Fischer :


 

Dans l’adaptation pour la scène du roman de Dostoïevski par Jean Gillibert, Christian Fischer a joué le rôle de Dmitri Fiodorovitch Karamazov.

La pièce mise en scène par  Jean Gillibert a été créee au théâtre du Lavoir Moderne Parisien en 1998

 

Ce témoignage a été publié  dans  Présence de Jean Gillibert, de  Michèle Venard, section Témoignages d’Artistes (Abellio, Audureau, Barthes, Bonnefoy, Camus, Deguy, Derrida, Dupré, Gracq, Lacarrière, Gaspar, Novarina, Schéhadé, Barrault, Audrain, Aufaure, Bollery, Boulva, Casares, Fau, Guizerix, Patte, Penchenat, Sermonne, Lacombe, Bresson) sur cet important homme de théâtre qu'est Jean Gillibert (né en 1925)

 

«  J’ ai rencontré Jean Gillibert   en 1982. Il m’ avait  répondu, alors que, acteur formé à la Cartoucherie, je cherchais de nouvelles rencontres artistiques. Il préparait  “  Mère Courage et ses enfants  “ .
J’ ai eu la chance de participer intensément à cette épopée, [ le monde tel qu’ il va ] , fable tragique et dérisoire dont il soulignait  l’ acuité poétique du langage
 
Son équipe était constituée de personnalités fortes, investies, attachantes: Josette Boulva, Sylvie Herbert, Suzel Goffre, Frédérique Ruchaud, François Kuki..
Les  indications  très  personnelles  de Jean Gillibert - l’ ouverture du sens , jouer la poésie de l’ oeuvre et non le texte - servaient aussi le travail profond de l’ acteur sur les personnifications, la vision de soi quand on joue, le déploiement de l’ organicité...
 
Je me souviens de la façon dont , telle une fileuse, Josette B. a construit  cette  Mutter Courage, par touches successives, gardant son texte jusqu’ aux dernières “ répétitions“, de son interprétation d’ Anna Fierling,  figure humaine, aiguë, implacable  qu’ elle  développait aussi face à l’ ironie féroce du cuisinier interprété par Jean Gillibert  [ “ le monde agonise “ ] 
 
Je me suis engagé dans l’ aventure d’ En Perce et investi dans les rôles de Kafka, Sade, Tounens, Ubu...Cependant, Intuitivement d’ abord, d’ une façon plus mûre et construite ensuite, de Phèdre  aux Vagants ,  j’ ai suivi en spectateur alerté, les créations de Jean Gillibert.
 
J’ ai  suivi cette vie de théâtre poétique et lyrique, l’ aventure de l’ Autre Théâtre, construire l’ imaginaire du spectateur avec et par l’ acteur passeur de temps.
 
Lorsque jean Gillibert m’ a proposé un challenge fort à relever, jouer dans son adaptation des Frères Karamazov  le personnage de Dmitri Fiodorovitch, j’ ai sauté dans l’ aventure
 
Comment retracer huit mois de travail intense et suivi avec Jean et seize acteurs investis dans sa vision de la pièce indiquée comme un choeur organique et utopiste, de l’ ordre du tragique religieux ?
 
Gillibert, regard lucide et profond, m’ a ouvert des portes de sens sur Dmitri, homme de la force de la terre, ramassé, farouche, instinctif, au bord de l’ abîme.
 
J’ ai pu alors, avant même de commencer à interpréter Dmitri, creuser la fatalité de sa faille, la décision secrète qui hante et contamine tout son parcours jusqu’ à la plongée dans le gouffre.
 
Secret d’ apparition, mise à nue, faille, aspérité, achoppements, médiations intimes, éclats de personnification incarnée, rêve - texte  dont  il  faut  rendre  le  désir  patent,  tout  ce  travail d’ accompagnement du passeur Jean Gillibert, sert l’ acteur - incarnateur
 
Passeur il est pour l’ acteur qui participe au rêve du texte, s’ y associe. Gillibert pour qui sait entendre  et  qui  sait  se  mettre  à  nu  jusqu’ à  l’os,  est un intercesseur vigilant et actif entre l’ oeuvre et l’ incarnation personnifiée par l’ acteur
 
Cher Jean, merci de demeurer, résistant du dedans, poète et homme de théâtre altier, présence en urgence, sentinelle de mémoire, clairvoyante et lucide. »
 
Christian Fischer

 

 

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